Mésinformation : quels sont les dangers ?


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Rédactrice : Ingrid de Chevigny

Fake news, rumeurs, manipulations : les fausses informations envahissent notre quotidien, notamment sur Internet et les réseaux sociaux. Parfois issues d’erreurs, parfois délibérément fabriquées, elles divisent et érodent la confiance.

Mais quels sont les risques concrets de ces dérives ? Quels sont les impacts potentiels d’une information fausse, d’une information trompeuse, ou encore d’une information malveillante ?

De l’impact sur nos choix individuels à la fragilisation des démocraties, cet article explore les dangers de ce fléau invisible, de plus en plus présent dans nos sociétés ultra-connectées, ainsi que les enjeux cruciaux de la vérification des faits.

Mésinformation, désinformation, malinformation : quelle différence ?

 

Qu’est-ce que la mésinformation ?

La mésinformation désigne une information inexacte ou erronée, mais diffusée sans intention de nuire. Elle résulte souvent d’une simple erreur ou d’une interprétation incorrecte. 

Par exemple, une statistique mal interprétée ou une image diffusée hors de son contexte peuvent involontairement devenir de la mésinformation. Cela peut semer le doute et renforcer de fausses croyances, surtout si la fausse information se propage rapidement.

Qu’est-ce que la désinformation ?

Contrairement à la mésinformation, la désinformation repose sur une intention claire de tromper. Il s’agit de diffuser une fausse nouvelle dans le but de manipuler, d’influencer ou de déstabiliser. 

Les deepfakes, les campagnes politiques trompeuses, la propagande, ou les théories complotistes fabriquées de toutes pièces en sont des exemples flagrants. La désinformation est souvent un outil de manipulation massive, utilisé pour diviser les sociétés ou influencer les opinions.

Qu’est-ce que la malinformation ?

La malinformation se distingue de la mésinformation et de la désinformation par un point clé : elle repose sur des faits authentiques. Mais ces faits sont utilisés pour nuire à une personne, un groupe ou une institution. 

L’objectif n’est pas de tromper, mais de causer un préjudice en exploitant des informations réelles hors de leur contexte, ou en les diffusant dans un but malveillant. Elle peut par exemple prendre la forme d’un partage de données confidentielles sans le consentement des individus concernés.

Trois concepts pour saisir les enjeux des fausses informations

La mésinformation, la désinformation, et la malinformation sont finalement trois formes de manipulation des faits, qui montrent les différentes facettes de la problématique des fausses informations.

Ce sont l’intention, le contexte et l’usage qui déterminent leur impact. Mais une chose est sûre : qu’elle soit involontaire, manipulatrice ou malveillante, toute déformation de l’information peut fragiliser la confiance, alimenter les divisions, et porter atteinte à des individus, des institutions, ou même des États.

Les conséquences de la mésinformation

 

Impacts sur la société

La mésinformation fragilise le tissu social en semant le doute et la confusion. Lorsqu’elle se propage à grande échelle, elle peut en effet :

  • Renforcer la polarisation des opinions et diviser les communautés

La mésinformation renforce les divergences entre les groupes aux opinions opposées, exacerbant les tensions et rendant les discussions constructives plus rares. Ces divisions fragmentent les sociétés et alimentent les conflits culturels et idéologiques.

Exemple : des rumeurs sur les origines d’un phénomène migratoire français peuvent opposer violemment des groupes pro et anti-immigration, encourageant la haine et empêchant un débat éclairé et nuancé.

  • Saper la confiance dans les institutions

La mésinformation visant des institutions comme les gouvernements ou les médias, fragilise leur crédibilité, et alimente la défiance des citoyens. Cela peut aller jusqu’à éroder les bases mêmes de la démocratie, du droit et de la gouvernance des États.

Exemple : pendant les élections aux États-Unis en 2024, des discours, articles ou vidéos sur l’organisation de fraudes électorales, même infondées, ont pu convaincre une partie de la population que le système était corrompu.

  • Perturber la gestion des crises

Lors des crises, la mésinformation peut entraîner des comportements inappropriés ou contraires aux recommandations des autorités ou de la science, ralentissant les efforts de résolution et augmentant les risques pour la population.

Exemple : pendant la pandémie de Covid, des rumeurs sur l’inefficacité ou la dangerosité des vaccins ont réduit les taux de vaccination dans certains groupes, compliquant la lutte contre le virus par le gouvernement français, et les politiques de santé publique.

  • Favoriser la montée des théories du complot

En déformant ou en exagérant des faits, la mésinformation alimente des récits complotistes qui sapent la confiance dans les consensus scientifiques et les actions collectives. Cela peut compliquer la résolution des grands défis contemporains.

Exemple : les fausses informations sur le réchauffement climatique renforcent les discours climatosceptiques, ralentissant la prise de mesures urgentes contre la crise environnementale, malgré le consensus scientifique sur le sujet.

Effets sur les individus

La mésinformation n’a pas que des effets néfastes sur la société. Elle a aussi des impacts sur le comportement, les croyances et le bien-être des individus, notamment des jeunes. 

Elle est à l’origine de :

  • La manipulation des décisions : des données incorrectes ou sorties de leur contexte peuvent réduire la capacité de certaines personnes à prendre des décisions éclairées, et les pousser à faire des choix regrettables, pouvant les faire tomber dans des arnaques.
  • L’amplification des peurs et de l’anxiété : les récits erronés ou alarmistes sur des sujets sensibles, comme la santé ou la sécurité, peuvent générer des inquiétudes excessives, ou des préjugés injustifiés envers certains groupes.
  • La confusion et le doute généralisé : être confronté à des informations contradictoires ou imprécises peut désorienter les individus, et alimenter une méfiance généralisée envers l’information, ce qui peut être une source d’épuisement cognitif et de mal-être.

 

Pourquoi la mésinformation se propage-t-elle rapidement ?

 

Les algorithmes des plateformes numériques

Les médias en ligne, les réseaux sociaux et les moteurs de recherche utilisent des algorithmes conçus pour maximiser l’engagement. 

Ces systèmes favorisent les contenus sensationnels ou polarisants, souvent caractéristiques de la mésinformation, car ils attirent davantage l’attention et suscitent des interactions. Résultat : ces nouvelles se retrouvent mises en avant, ce qui amplifie leur propagation, en particulier auprès des populations les plus jeunes.

L’impact des biais cognitifs

Les biais cognitifs jouent aussi un rôle clé dans la propagation de la mésinformation, en renforçant des comportements irrationnels à l’égard des informations disponibles. 

Le biais de confirmation, par exemple, pousse les individus à rechercher et à partager des informations qui confortent leurs croyances préexistantes, même si elles sont incorrectes. Ce mécanisme peut rendre une fausse nouvelle particulièrement attrayante pour des groupes déjà convaincus.

Le biais d’ancrage, quant à lui, fait que la première information reçue sur un sujet influence fortement les jugements ultérieurs, même si cette information est erronée. Par exemple, une mésinformation initiale sur une crise peut laisser une impression durable, malgré des corrections ultérieures.

Ces biais, combinés, favorisent la diffusion de contenus sensationnels ou simplistes, rendant la mésinformation plus difficile à corriger une fois qu’elle s’est propagée.

Comment identifier et combattre la mésinformation ?

 

Les solutions à l’échelle individuelle

Chaque personne peut contribuer à limiter la propagation de la mésinformation en adoptant des pratiques simples mais efficaces. La première étape consiste à adopter le réflexe de vérifier une information avant de la partager. 

Cela implique de consulter plusieurs sources fiables, de remonter à l’origine des faits, ou encore de s’assurer que le contenu n’a pas été sorti de son contexte. Une simple visite sur une page de fact-checking peut aussi permettre de démêler le vrai du faux, et d’éviter de partager une information incorrecte.

Des outils de vérification sont par ailleurs disponibles pour aider les individus à analyser les contenus qu’ils rencontrent. Par exemple, des moteurs de recherche inversée pour les images, comme TinEye ou Google Images, permettent de retrouver l’origine d’une photo numérique suspecte. 

L’outil de décryptage de vidéos Deepware peut par ailleurs aider à identifier un deepfake, même si certains contenus manipulés nécessitent un niveau élevé d'expertise pour être détectés.

Les initiatives collectives et institutionnelles

Au-delà des actions individuelles, des efforts collectifs et institutionnels sont essentiels pour combattre la mésinformation à grande échelle. Les gouvernements, les médias et les plateformes numériques travaillent de plus en plus ensemble pour limiter la diffusion des contenus erronés.

Parmi les initiatives, on trouve les campagnes d’éducation aux médias, qui visent à développer l’esprit critique des utilisateurs, et à sensibiliser le public à l’importance de vérifier les informations. Ces programmes aident les citoyens à reconnaître les signes de mésinformation et à réagir de manière éclairée.

Les journalistes se mobilisent aussi de plus en plus face au phénomène des fake news, en redoublant de précautions dans la vérification de leurs sources, et en proposant de plus en plus de ressources de fact-checking pour lutter contre la désinformation.

De leur côté, les plateformes numériques ajustent progressivement leurs algorithmes pour réduire la visibilité des contenus douteux, tout en mettant en avant des sources fiables. Des partenariats avec des organismes de fact-checking permettent également de signaler les fake news aux utilisateurs.

Enfin, certaines législations adoptées à l’échelle nationale ou européenne encadrent la désinformation en ligne, notamment en demandant une plus grande transparence aux plateformes digitales. Ces mesures contribuent à responsabiliser les acteurs tout en préservant la liberté d’expression.

Pour conclure, la mésinformation, bien qu’elle soit involontaire, peut avoir des effets dévastateurs au niveau individuel et collectif en semant la division, la méfiance et la confusion. La comprendre et la combattre, c’est faire un pas décisif vers une information plus éclairée et une cohésion sociale renforcée.

FAQ

 

Quelles sont les différentes formes d’altération de l'information ?

La désinformation, la mésinformation et la malinformation sont les principales formes de manipulation problématique des faits.

Quels sont des exemples de mésinformation ?

Pendant la pandémie de Covid, une rumeur affirmait que boire de l’eau chaude pouvait « éliminer » le virus. Bien que cette idée ne soit pas prouvée par la science, elle s’est rapidement propagée, semant la confusion, et détournant l’attention des recommandations sanitaires importantes comme la vaccination et les gestes barrières.

Quels sites utiliser pour vérifier l'information ?

Les plateformes de fact-checking comme DE FACTO et les rubriques dédiées à la vérification de l’information dans les médias traditionnels (comme Les Décodeurs du Monde ou Check News de Libération) sont des ressources très utiles pour vérifier l'information.

Que dit le droit sur la mésinformation ?

Le droit français garantit la liberté d'expression, mais encadre strictement la diffusion de fausses informations, notamment lorsqu'elles portent atteinte aux droits fondamentaux ou à l'ordre public.