La protection des vaccins contre les formes sévères du Covid n’est-elle plus que d’un mois et demi, comme l’affirme Didier Raoult?


La protection des vaccins contre les formes sévères du Covid n’est-elle plus que d’un mois et demi, comme l’affirme Didier Raoult?

Publié le jeudi 19 mai 2022 à 15:35

– Mis à jour le mardi 17 mai 2022 à 11:03

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Didier Raoult lors d'une conférence de presse en avril 2022.

(Christophe Simon / AFP )

Auteur(s)

Florian Gouthière

Contrairement à ce qu’affirme le professeur marseillais, les données disponibles confirment que la protection contre les formes graves de la maladie reste significative, de nombreux mois après la troisième dose.

Ce 5 mai, sur le plateau de Touche pas à mon poste, Didier Raoult déclare : «La durée de protection de ce vaccin, dans la situation actuelle, c’est peut-être un mois et demi, pour les formes les plus graves. C’est très peu.»

Cette affirmation est en réalité invalidée par de nombreuses études internationales. Celle menée par les centres pour le contrôle des maladies des Etats-Unis, publiée mi-février, établissait ainsi que durant les mois de propagation du variant omicron (BA.1), l’efficacité contre le passage aux urgences était estimée «à 87% pendant les deux premiers mois après une troisième dose», et à 66% «chez les personnes vaccinées depuis quatre à cinq mois». Quant à l’efficacité contre les hospitalisations, elle était respectivement de 91% et 78%.

Une autre étude menée au Royaume-Uni, publiée mi-avril dans The Lancetestime la protection contre le risque d’hospitalisation lié à omicron (BA.1), durant les trois premiers mois après la troisième dose, autour de 85%. La réduction du risque d’entrée aux urgences était, elle, voisine de 77%. Au-delà de trois mois, sur ces deux critères, l’efficacité observée était supérieure à 50%, avec des marges d’erreur de respectivement vingt et quinze points.

Formes sévères

La protection du vaccin contre les formes sévères semble persister tant pour les variants BA.1 que BA.2 du Sars-CoV-2. Contacté par CheckNews, le docteur qatari Hiam Chemaitelly renvoie aux données présentées fin mars sur la plateforme MedRxiv par son équipe. Selon cette prépublication, un mois et demi après une troisième dose de vaccin, l’efficacité observée du vaccin Pfizer contre l’hospitalisation et les décès était de l’ordre de 98% dans la population étudiée, tant face aux sous-variants BA.1 qu’au BA.2. «Nos travaux montrent qu’il existe de grandes différences dans l’efficacité du vaccin contre l’infection, en fonction du variant, et que cette efficacité contre l’infection diminue rapidement, détaille le docteur Chemaitelly. En revanche, en ce qui concerne les formes sévères de Covid-19, les différences sont faibles d’un variant à l’autre. Et la protection contre ces formes sévères s’estompe lentement.»

Des données israéliennes sur les personnes de 60 ans et plus, présentées en prépublication début mai, identifient également un effet protecteur significatif contre les formes sévères, persistant durant au moins les sept premiers mois après la troisième dose. Sur l’ensemble des études évoquées, des biais démographiques, géographiques ou comportementaux peuvent exister (exposition variable au virus selon le statut vaccinal ou l’âge, par exemple). Reste que l’ensemble des publications et prépublications disponibles à ce jour contredisent les déclarations de Didier Raoult dans l’émission de Cyril Hanouna.

Contactée par CheckNews pour savoir à quelles données le médecin marseillais se référait, son équipe n’a pas donné suite.