Réforme des retraites : nouveau couac de com’ pour Elisabeth Borne sur les carrières longues


Réforme des retraites : nouveau couac de com’ pour Elisabeth Borne sur les carrières longues

Publié le mercredi 8 mars 2023 à 17:24

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Elisabeth Borne à l'Assemblée nationale le 7 février

(Ludovic Marin / AFP )

Auteur(s)

Luc Peillon

Contrairement à ce qu’a affirmé la Première ministre sur France 5, les carrières longues vont bien devoir travailler deux ans de plus avant de pouvoir «surcoter».

Nouveau raté du gouvernement dans sa communication sur la réforme des retraites. Cette fois-ci sur la possibilité, ou non, pour les «carrières longues», de surcoter dès leur âge de départ anticipé sans attendre l’âge légal.

Pour rappel, le système «carrières longues», créé en 2003, permet à des personnes ayant commencé à travailler jeunes, et sous réserve d’avoir cotisé un certain nombre de trimestres, de pouvoir partir avant l’âge légal, aujourd’hui fixé à 62 ans et décalé, demain avec la réforme, à 64 ans.

Invitée lundi 6 mars dans l’émission C à Vous, sur France 5, à la veille de la journée de mobilisation du 7 mars, la Première ministre était ainsi interpellée par deux futurs retraités, dont l’un est concerné par ce dispositif.

Dans la vidéo (à 42′), Pascal, salarié dans le tourisme, s’estime «perdant» avec la réforme : «J’ai commencé à travailler à 16 ans, j’ai 60 ans, je suis une longue carrière. Actuellement, je peux partir en retraite, sauf que j’avais prévu, vu le montant de ma retraite, de rester deux ans de plus pour avoir une légère surcote, et maintenant pour l’avoir, je serai obligé de travailler jusqu’à 64 ans, ce qui fait quatre ans de plus».

Data

Quand et dans quelles conditions allez-vous pouvoir partir à la retraite ?

Economie

16 janv. 2023

Retour en plateau : «Donc il y aura des perdants, contrairement à ce qu’affirme Olivier Dussopt ?», interroge la journaliste. Réponse de la Première ministre : «Pour [Pascal], il pourra toujours liquider sa retraite à taux plein à 60 ans et donc bénéficier d’une surcote au-delà d’un âge qui n’est pas bougé».

Patrick Cohen : «Mais la surcote, ce bonus-là, il disparaît par l’effet de…» Borne : «Les carrières longues ? Non, non, son âge de départ reste 60 ans, il n’y a pas de changement pour lui, [….] l’âge de départ ne change pas pour lui, et donc l’âge auquel il peut avoir une surcote non plus».

L’âge de surcote va bien reculer

Elisabeth Borne fait en réalité une réponse erronée. Certes, la possibilité d’un départ à 60 ans pour une personne qui a commencé à travailler à 16 ans devrait rester inchangée. 

Mais là où la Première ministre se trompe, c’est quand elle affirme que Pascal pourra surcoter dès son âge de départ anticipé pour carrières longues, à savoir 60 ans pour lui. En effet, la surcote permet de majorer sa pension de 5 % pour toute année cotisée au-delà de la durée exigée pour une carrière complète, mais aussi – condition supplémentaire – une fois atteint l’âge légal de départ. Et non pas dès l’âge de départ anticipé pour carrière longue.

Ainsi, pour pouvoir commencer à surcoter, Pascal devra attendre 64 ans, au lieu de 62 ans aujourd’hui. Il devra donc bien travailler deux ans de plus avant de pouvoir majorer sa pension (1). En revanche, il accumulera davantage de points pour sa retraite complémentaire. Mais ce système, géré par les partenaires sociaux, est sans rapport avec la réforme.

Seul moyen éventuel de surcoter, à l’avenir, avant l’âge légal de 64 ans : l’amendement porté par le Sénat qui permettrait aux mères ayant eu deux enfants et une carrière complète de majorer leur pension de 1,25 % par trimestre supplémentaire cotisé entre 63 et 64 ans.

(1) A noter que Pascal, pour sa part, semble lui aussi se tromper: ses propos laissent penser qu’il pouvait aujourd’hui surcoter à partir de 60 ans, et que demain il ne pourra bénéficier d’une majoration de pension qu’à partir de 62 ans, qu’il pense être son nouvel âge de départ anticipé. Sauf que comme évoqué plus haut, son âge de départ anticipé ne change pas (il reste à 60 ans). Et d’ores et déjà, même sans réforme, il ne peut surcoter avant l’actuel âge légal de 62 ans (64 ans après la réforme).