Le sida, provoqué par le VIH, a tué plus de 40 millions de personnes depuis les années 80


Le sida, provoqué par le VIH, a tué plus de 40 millions de personnes depuis les années 80

Publié le mercredi 19 avril 2023 à 11:21

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AFP France

Le sida a tué 40 millions de personnes dans le monde depuis son apparition dans les années 80. Pourtant, des internautes soutiennent encore aujourd'hui que cette maladie n'existe pas, que le sida n'est pas provoqué par un virus, et que cette pandémie a été fabriquée de toutes pièces pour "faire peur" et "vendre des médicaments". C'est totalement faux, le sida est bien provoqué par le VIH, et n'est toujours pas éradiqué, malgré les progrès de la science.

"Il faut que l'escroquerie sida tombe". Selon Jérémie Mercier, qui se présente comme "éducateur en santé" sur son site internet et sur les réseaux sociaux, le sida est une invention des médecins et des politiques pour "faire peur", comme "tous les virus". 

Dans une longue vidéo de près de 40 minutes, il martèle que le sida est "une fausse P.A.N.D.E.M.I.E" et évoque "des faux traitements", "des fausses promesses", des "fausses mesures de prévention et de précaution".

Son argumentaire? Le sida aurait été inventé de toute pièces à partir de "quelques cas de personnes malades aux Etats-Unis d'abord (...) de maladies qui n'étaient pas nouvelles mais qu'on a prétendu être nouvelles, et d'origine inconnue (...) On a précisé juste que ces personnes étaient de jeunes homosexuels"

Selon Jérémie Mercier, "une part d'homophobie" a poussé à conclure que "ces personnes sont homosexuelles donc ça vient des rapports sexuels, alors que ça n'a aucun rapport".

Sur YouTube, deux jours après sa diffusion, le 17 avril, la vidéo avait été visionnée 11.000 fois, avec de nombreux et les commentaires de soutien. Parmi eux, beaucoup font le lien, comme Jérémie Mercier d'ailleurs, avec la pandémie de Covid, comme on peut par exemple le voir dans le commentaire ci-dessous. 

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Capture d'écran de YouTube faite le 17 avril 2023

 

La vidéo a aussi été partagée plus de 1.400 fois sur la plateforme Odysee, plus de 600 fois via le compte Facebook de Jérémie Mercier et plus de 400 fois sur Twitter.

Qui est Jérémie Mercier?

Sur son site, il affirme: "je suis là pour vous donner accès à des informations peu connues sur le fonctionnement du corps et vous aider à prendre soin de votre santé" et promeut "des techniques de santé naturelle bien plus efficaces que n’importe quel médicament et dont on parle trop peu".

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Capture d'écran du site de Jérémie Mercier faite le 17 avril 2023

 

Depuis 2020, Jérémie Mercier relaie certaines infox sur la pandémie de Covid et affirme sur son site "qu’il n’y a pas eu de pandémie et que les mesures 'sanitaires' (confinement, vaccination) ont occasionné une mortalité excédentaire". Il fait partie du collectif RéinfoCovid, fondé par Louis Fouché, qui a relayé de nombreuses affirmations fausses sur le Covid et les vaccins.  

Les allégations trompeuses de Jérémie Mercier lui-même sur le vaccin anti-Covid ont déjà fait l'objet d'un article de l'AFP Factuel.

Le sida vient bien d'un virus, le VIH

Jérémie Mercier assure: "On a décrété à partir de quelques cas de personnes malades (…) qui n’étaient pas nouvelles mais qu’on a prétendu être nouvelles et étant d’une origine inconnue".

Selon lui, les médecins ont attribué le sarcome de Kaposi, une tumeur très agressive dont souffrent de nombreux malades du sida, à un virus, le VIH, "parce que le virus c'était vachement tendance avant".

"Ils n'arrivent pas à trouver de virus pour le cancer, alors il faut bien en trouver pour autre chose", assène-t-il. "Un virus ça fait peur, ça attire des fonds", selon lui.

Il affirme aussi qu'en Afrique, "plein de gens souffraient de maladies liées à la malnutrition et à la pauvreté, on va appeler ça du sida et on va affirmer : l’Afrique est rongée par le sida".

Le terme "sida", acronyme de "syndrome d'immunodéficience acquise", apparaît en 1982, soit près d'un an après la détection des premiers cas de la maladie chez de jeunes homosexuels californiens souffrant d'une maladie pulmonaire rare, la pneumocystose.

Le sida est la manifestation la plus grave, la forme la plus avancée d'un virus découvert en 1983 par une équipe française de l'Institut Pasteur à Paris et qui sera nommé trois ans plus tard VIH (virus de l'immunodéficience humaine).

"Ainsi, une personne qui a le sida est nécessairement porteuse du VIH, mais une personne qui est porteuse du VIH n’a pas nécessairement le sida", rappelle l'Institut Pasteur.

Le virus du VIH, cent fois plus petit qu’une cellule, cible des cellules du système immunitaire comme les lymphocytes T CD4 et les macrophages.

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Quand l'équipe de l'Institut Pasteur publie dans la revue Science en mai 1983 sa découverte d'un nouveau rétrovirus, l'annonce est accueillie avec scepticisme. 

En 1985, un consensus scientifique se fait autour du VIH, et l'équipe de Pasteur a reçu en 2008 par le Nobel de médecine.

Jérémie Mercier affirme aussi que les tests de séropositivité sont "de faux tests", quand bien même ils ont fait leurs preuves depuis 1985, rappelle l'Institut Pasteur.

"L’OMS recommande que toute personne à risque de contracter le VIH ait accès au dépistage", préconise l'Organisation mondiale de la santé (archive).  

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Un test de dépistage du sida

AFP

 

Le VIH se transmet bien sexuellement

Autre fausse allégation diffusée par Jérémie Mercier: le sida ne serait pas une maladie sexuellement transmissible.

"On a dit 'elles [les personnes malades, NDLR] sont homosexuelles donc ça vient de rapports sexuels', alors que ça n'a aucun rapport", assure-t-il.

Il poursuit : "ils vont dire que c’est une maladie sexuellement transmissible alors que non, et ils vont pas du tout s’intéresser au fait que ces personnes consomment des drogues".

Pour Jérémie Mercier, c'est là l'unique explication des symptômes observés avec le sida: les drogues créent selon lui "des phénomènes d’intoxication" chez des personnes "en antibiothérapie en permanence" pour "éviter d’avoir des MST", maladies sexuellement transmissibles.

Selon l'ONUsida (archive), le risque de contracter le VIH est "35 fois plus élevé chez les personnes qui s'injectent des drogues que chez les adultes qui ne s'injectent pas de drogues": pour autant les toxicomanes ne sont pas la seule population concernée par le sida, loin de là.

Depuis la découverte du sida, il a été établi scientifiquement que toute personne -quels que soient son sexe, son âge ou ses pratiques sexuelles- pouvait être contaminée par le VIH, et pas seulement les toxicomanes. Le VIH se transmet par le contact avec les liquides organiques d’un sujet infecté : sang, lait maternel, sperme et sécrétions vaginales, d'où une transmission facilitée via notamment les échanges de seringues entre toxicomanes.

Pour s'en protéger lors d'un rapport sexuel, le préservatif reste donc la meilleure barrière au virus, contrairement à ce qu'affirme Jérémie Mercier, qui assure -à l'encontre de toutes les préconisations scientifiques et sanitaires- que les "mesures de précaution n’ont aucun sens" et que "le préservatif protège peut-être des MST ou d'une grossesse mais pas du sida puisqu’il n'y a aucun rapport".  

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Des préservatifs à Hong-Kong

AFP

 

Des traitements en constante évolution depuis les années 80

Autre théorie fausse de Jérémie Mercier: les "faux traitements" imposés aux personnes malades du sida rendent les gens "malades".

Il évoque notamment "la molécule AZT, extrêmement toxique". L'AZT, l'azidothymidine, était la première à faire effet contre le sida, en ralentissant la réplication du virus, à une époque où les malades étaient condamnés à mort. Ses effets secondaires sont très importants, et elle a depuis été remplacée par des traitements bien plus performants, et aujourd'hui il existe cinq grands types d'antirétroviraux, comme le rappelle aussi l'Institut Pasteur sur son site.

Depuis dix ans, un traitement préventif du VIH dit PrEP ("prophylaxie pré-exposition") a aussi prouvé son efficacité.

Selon l'ONUsida, depuis 2010, "les nouvelles infections au VIH ont diminué de 32%, passant de 2,2 millions à 1,5 million en 2021", et la mortalité liée au sida a diminué de 57% chez les femmes et les filles et de 47% chez les hommes et les garçons depuis 2010.

Une pandémie qui a tué plus de 40 millions de personnes

Ttoujours selon l'ONUsida, le VIH a infecté 84,2 millions de personnes dans le monde depuis le début de l'épidémie mondiale, et tué plus de 40 millions de personnes.

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Aujourd'hui encore, même si les thérapies permettent aux personnes infectées de vivre longtemps, "un quart des personnes qui vivent avec le VIH n'ont toujours pas accès aux traitements pour différentes raisons, y compris le fait que le dépistage est insuffisant", déplorait la chercheuse et prix Nobel Françoise Barré-Sinoussi dans un entretien à l'AFP en mars.

Elle rappelait aussi qu'"on n'a pas encore éradiqué la maladie", malgré des cas prometteurs de guérison après des greffes de moelle osseuse.

Le sida est souvent au coeur de nombreuses infox- particulièrement en Afrique - démystifiées dans des articles de vérification der l'AFP ici ou .

Des fausses théories sur le sida ont aussi été  réactivées par la crise Covid, notamment parce que le Pr Luc Montagnier (co-découvreur du VIH mais qui avait ces dernières années relayé de très nombreuses infox pseudo-scientifiques) avait assuré que le Sars-CoV-2 (virus à l'origine du Covid) contiendrait des morceaux de VIH. 

La pandémie de Covid sert d'ailleurs  d'argument à Jérémie Mercier pour dénoncer l"escroquerie Covid": "A chaque fois qu’on vous sort une histoire de virus, c’est une histoire de contrôle, sans fondement scientifique", dénonce-t-il. 

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