Une goutte d’huile pour étouffer une tique ? Un conseil récurrent l'été, mais fermement déconseillé par les experts


Une goutte d’huile pour étouffer une tique ? Un conseil récurrent l'été, mais fermement déconseillé par les experts

Publié le vendredi 22 juillet 2022 à 11:53

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(AFP)

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AFP France

Chaque été le "conseil" revient inéluctablement sur les réseaux sociaux : "mettre une goutte d’huile de cuisine(...) pour étouffer une tique". Mais cette méthode n’est pas recommandée par les experts interrogés régulièrement par l’AFP, et pourrait au contraire, selon eux, "augmenter les chances de transmission d'une d’infection".

Il existe un peu moins de 900 espèces de tiques différentes dans le monde dont 41 sont présentes en France. La plus répandue étant Ixodes Ricinus, "susceptible de s’infecter ou de transmettre un ou plusieurs agents pathogènes dont les agents de la maladie de Lyme mais également le virus de l'encéphalite à tiques", comme l'explique ici l'Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (INRAE). 

Les tiques en général sont répandues partout en France (bien que certaines espèces ne survivent pas dans certains climats), surtout en dessous de 1500 m d’altitude. Elles vivent dans des zones boisées et humides, les herbes hautes des prairies, les jardins et les parcs forestiers ou urbains. Les contaminations humaines sont plus fréquentes à la période d’activité maximale des tiques, en France entre le début du printemps et la fin de l’automne, selon Santé publique France

Ce qui explique que des conseils pour se débarrasser de l'animal pullulent avec l'arrivée des beaux jours. Mais comme pour le coton imbibé de savon, la méthode de la goutte d'huile est contre-productive, ont déjà expliqué plusieurs experts à l'AFP.

89a148dafcc0e909158665b0297c71b050bbff61-ipad.jpgCapture d'écran Facebook prise le 21/07/2022

Non seulement elle n’est pas recommandée en cas de piqûre, mais elle augmenterait au contraire les risques de maladies, selon Pascale Frey-Klett, directrice de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (Inra) et responsable du programme de recherche collaboratif CiTique.

"Il ne faut utiliser aucune molécule extérieure car cela va stresser la tique et augmenter ainsi le risque qu’elle rejette les agents infectieux dans le corps de la personne ou de l’animal piqué", expliquait déjà en 2019 la scientifique.

Des produits comme l'huile ou l'éther ont été utilisés par le passé pour retirer ces acariens, mais cette méthode est à proscrire. “Elle facilite le processus de régurgitation et augmente donc les chances de tomber malade”, ajoutait Pascale Frey-Klett. 

Pour elle, une seule technique est efficace : "Dès qu’une piqûre est constatée, il faut retirer la tique au plus vite, même maladroitement car les agents infectieux se situent dans la partie extérieure de la tique, c’est-à-dire celle qui n’est pas encore entrée dans la peau".

"Ce n'est pas du tout une bonne méthode (...) elle augmente les chances de transmission d'une infection", expliquait en 2020 Jonas Durand, ingénieur au sein du programme CiTique.

"Certes, la tique va se détacher, mais en régurgitant de la salive et du sang sur son hôte, les chances de transmission d'un agent pathogène s'accentuent", assure Jonas Durand. "Et ce n'est pas la tique qui pose problème, mais les bactéries qu'elle peut transmettre", rappelait-il, comme la bactérie Borrélia, qui provoque la maladie de Lyme.

61f638b42049704d091a4c12f193ccfed4a68456-ipad.jpgSymptômes, prévention, traitements et données sur la maladie de Lyme

Jean-François Cosson, directeur de recherche en écologie des maladies infectieuses à l’Inra, abondait de son côté en 2019: "étouffer l’animal" avec une molécule extérieure n’est pas une bonne option. "Une tique est capable de résister très longtemps et d’injecter des pathogènes dangereux pour l’homme", dont la bactérie Borrélia, à l’origine de la maladie de Lyme.

En cas de piqûre, "il y a trois choses à faire", selon Jean-François Cosson :

  • "Enlever la tique en tournant légèrement avec un tire-tique ou une pince, dans n’importe quel sens, à la base du rostre(la partie de l’acarien qui est planté dans la peau, ndlr) jusqu’à ce que la tique se décroche toute seule"
  • "Désinfecter"
  • "Surveiller 3 ou 4 semaines pour voir s’il n'y a pas d’apparition d’une auréole rouge qui s’élargirait et qui pourrait signer la maladie de Lyme

Pour mieux comprendre les conditions de vie de ces parasites amateurs de sang frais, leurs interactions avec leur environnement, dans quelles conditions ils se développent et où le risque de se faire piquer est le plus grand, les chercheurs comptent sur le programme Citique, et son application "Signalement Tique" dont une nouvelle version est maintenant disponible.

N'importe qui peut y signaler ses piqûres, puis envoyer les tiques piqueuses, dont les chercheurs manquent cruellement.

Enfin il ne faut pas penser que le risque de se faire piquer par une tique n'existe qu'en forêt ou dans un champ.  

"30% des signalements de piqûres d'être humains que nous recevons dans le cadre du programme de recherche participative CiTIQUE proviennent de jardins privés. Il faut donc aussi faire attention dans des milieux plus familiers", soulignait déjà Jonas Durand auprès de l'AFP en 2020.

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