Violences urbaines : un homme a-t-il été condamné à dix mois de prison ferme pour le vol d’une canette de Redbull ?


Violences urbaines : un homme a-t-il été condamné à dix mois de prison ferme pour le vol d’une canette de Redbull ?

Publié le jeudi 6 juillet 2023 à 10:52

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Le tribunal judiciaire de Marseille. 

(Magali Cohen / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP)

Auteur(s)

Anaïs Condomines

Le tribunal de Marseille a condamné un homme pour «vol par effraction en réunion» à dix mois de prison ferme. Une peine sévère, appliquée dans le cadre d’une récidive légale.

Sur les réseaux sociaux, ce mardi 4 juillet, circule massivement le court extrait d’un reportage de BFMTV, portant sur le profil des «émeutiers». D’une durée de quelques secondes seulement, on y entend, de manière isolée, une avocate affirmer ceci : «J’ai plaidé pour l’un des dossiers. Mon client n’avait pris qu’une canette de Redbull et il a écopé de dix mois d’emprisonnement ferme.»

Cet extrait est issu d’un reportage plus long, diffusé dans la matinée de ce mardi 4 juillet sur la chaîne d’info en continu, portant sur les comparutions immédiates menées à Créteil et à Marseille, dans le contexte des violences urbaines de ces derniers jours. En l’occurrence, l’avocate Camille Bal, qui s’exprime au micro de BFM TV et relate le cas de son client, est inscrite au barreau de Marseille.

«Il a été cueilli comme une rose»

Auprès de CheckNews, elle confirme avoir défendu la veille, au tribunal correctionnel, parmi d’autres personnes principalement interpellées pour des pillages, un homme âgé de 28 ans. Celui-ci a été arrêté par les forces de l’ordre, le 29 juin dans la soirée, alors qu’il sortait d’un magasin Monoprix pillé, une canette de Redbull à la main. Selon elle, «les principaux acteurs des violences sont les grands absents des audiences qui se sont tenues hier. Ceux qui ont été cueillis par la police sont ceux qui sont apparus après le délit, après que le magasin a été la cible des casseurs. Mon client est venu dans le Monoprix plongé dans le noir, il a pris une canette de Redbull, il est sorti et il a été cueilli comme une rose».

Concernant le profil du prévenu, Camille Bal détaille qu’il suit un lourd traitement pour troubles psychologiques, «ce qui ne l’empêche pas d’être inséré, d’avoir un BTS et un bac STMG marketing, et de travailler aujourd’hui en intérim». Elle ajoute : «C’est un garçon sans histoires.» Qui présente toutefois un antécédent judiciaire : l’année dernière, il était jugé en comparution volontaire sur reconnaissance préalable de culpabilité (procédure du «plaider-coupable» qui permet un jugement rapide et propose une peine inférieure à celle encourue) pour vol avec effraction et écopait d’une peine d’un an d’emprisonnement, assorti du sursis.

Le contexte des émeutes

De fait, ce lundi 3 juillet, le tribunal de Marseille a jugé cet homme pour des faits de «vol par effraction en réunion»«et ce en état de récidive légale pour avoir été condamné», en février 2022, «pour des faits similaires ou assimilés». Une précédente mention au casier qui, selon l’avocate, ne peut expliquer seule la sévérité de la peine appliquée. D’autant que son client, sous le coup d’un mandat de dépôt, a directement été emmené en détention après l’audience. «Cette peine paraît sévère mais à mon avis, elle est contextualisée par rapport aux émeutes. L’objectif pour le juge est de rétablir l’ordre public et la paix sociale tout en dissuadant ceux qui seraient tentés de se mêler à de tels actes répréhensibles.» Elle ajoute : «Il est évident que s’il n’y avait pas eu ce contexte d’émeutes, mon client aurait été éligible à une nouvelle procédure de reconnaissance préalable de culpabilité.» Et donc à une peine potentiellement inférieure. Elle indique ce mardi 4 juillet sa volonté d’étudier la demande d’un aménagement de peine pour son client.

Dans leurs comptes rendus d’audience, de nombreux journalistes présents lors des comparutions immédiates de ce début de semaine, après les dégradations commises dans le contexte de la mort du jeune Nahel, ont décrit des peines lourdes, appliquées «pour l’exemple», que ce soit à Marseille ou ailleurs en France. Sollicité, le parquet de Marseille n’a pas donné suite.