Cette vidéo de personnes arborant un drapeau russe devant la tour Eiffel n'a pas de rapport avec l'attentat de Moscou


Cette vidéo de personnes arborant un drapeau russe devant la tour Eiffel n'a pas de rapport avec l'attentat de Moscou

Publié le mardi 26 mars 2024 à 18:22

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AFP France

Un attentat dans une salle de concert en banlieue de Moscou a fait au moins 139 morts vendredi 22 mars. Il a été revendiqué par l'Etat islamique. L'attentat a suscité de nombreuses infox. Parmi elles, une vidéo de personnes tenant un drapeau russe et arborant un t-shirt à l'effigie de Vladimir Poutine a largement été partagée sur les réseaux sociaux avec des messages sous-entendant qu'elle montrerait un récent rassemblement de soutien au peuple russe après l'attaque. Attention : la vidéo avait en réalité été publiée en 2022 et n'a pas de rapport avec l'attentat du 22 mars.

Le 22 mars au soir, vers 20H15 à Moscou (17H15 GMT), plusieurs individus armés ont mené un assaut sur le Crocus City Hall, une salle de concert située à Krasnogorsk, à la sortie nord-ouest de la capitale russe (lien archivé ici).

Les auteurs auraient utilisé des "armes automatiques" et incendié le bâtiment à l'aide d'un "liquide inflammable", a déclaré le Comité d'enquête le 23 mars. Les services de secours, cités par l'agence Interfax, ont indiqué que les assaillants avaient "ouvert le feu sur les agents de sécurité à l'entrée de la salle de concert", avant de "commencer à tirer sur le public".

Selon le bilan officiel communiqué le soir du 25 mars, cette attaque a fait au moins 139 morts et 182 blessés.

Dans ce contexte, une vidéo de personnes arborant un drapeau russe et affirmant soutenir la Russie et son président Vladimir Poutine a été relayée sur X à plus de 2.000 reprises, et a aussi été diffusée sur Tiktok, sur Facebook et sur YouTube avec le mot-clé #MoscowAttack, laissant à penser qu'il s'agirait d'une manifestation faisant suite à l'attentat.

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Capture d'écran prise sur X le 26/03/2024

Mais cette vidéo avait déjà circulé en septembre 2022 et n'a pas de lien avec l'attentat récent. 

Une vidéo de septembre 2022

Une recherche d'image inversée nous a permis de retrouver une occurrence de la vidéo publiée le 15 septembre 2022 sans plus de précisions par un compte X intitulé "russophobie.org", lié au site éponyme qui diffuse régulièrement des articles prorusses visant à dénoncer des actes de "russophobie".

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Capture d'écran de deux publications X, celle de 2022 (à gauche) et celle de 2024 (à droite)

D'autres comptes et sites, notamment liés à l'association d'extrême droite Egalité-Réconciliation, ont aussi diffusé la vidéo en précisant qu'elle montrerait des "jeunes Français" qui "soutiennent la Russie de Poutine". 

Mi-mars 2024, une conférence prorusse de cette même association invitant, fondée par l'essayiste d'extrême droite Alain Soral en 2007, avait été interdite en Moselle en raison de "risques de troubles à l'ordre public", comme rapporté dans cette dépêche (archivée ici) de l'AFP.

La vidéo avait été diffusée le 15 septembre 2022, jour où la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait réaffirmé le soutien de l'Europe à l'Ukraine lors d'un déplacement à Kiev (lien archivé ici).

Elle avait assuré l'Union européenne soutiendrait l'Ukraine "aussi longtemps qu'il le faudra" et a appelé à fournir au pays toute l'aide militaire nécessaire, même si le coût en était "élevé".  

Elle avait aussi plaidé en faveur d'une comparution de Vladimir Poutine devant la justice internationale. "Il faut que Poutine perde cette guerre et réponde de ses actes, c'est important pour moi", avait-elle dit auprès de la chaîne de télévision du quotidien Bild. "Les fondements de notre système de droit international demandent que nous poursuivions de tels crimes et, au bout du compte, c'est Poutine qui en est responsable", avait-elle ajouté.

Des condamnations de l'attaque et des soutiens internationaux

Après l'attaque meurtrière près de Moscou, de nombreux représentants politiques, dont ceux de la France, de l'UE et des Etats-Unis ont condamné (lien archivé ici) les auteurs de la tuerie.

En France, l'Assemblée nationale a observé une minute de silence le 26 mars, en hommage aux victimes de l'attaque meurtrière.

"Huit ans et demi après l'attentat du Bataclan, le terrorisme islamiste a de nouveau frappé lâchement le public d'une salle de concert", a dénoncé la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet (Renaissance), à l'ouverture de la séance des questions au gouvernement.

"La France a toujours condamné de tels actes et lutté contre le terrorisme islamiste. Où qu'il frappe, quel qu'en soit le prétexte, il doit être combattu", a-t-elle poursuivi, en annonçant une minute de silence "en mémoire des victimes et en signe de solidarité avec leurs proches".

Le Premier ministre, Gabriel Attal, a ensuite fait part de sa "solidarité envers le peuple russe, un peuple que nous n'avons jamais confondu avec ses dirigeants".

Samedi 23 mars, le lendemain de l'attentat, de nombreux Russes avaient afflué (lien archivé ici) vers des centres de dons du sang à Moscou ou des mémoriaux improvisés, pour rendre hommage de victimes ou tenter d'aider les blessés.

Le lendemain, la Russie avait observé une journée de deuil national pour commémorer les victimes de cette attaque, la plus meurtrière en Russie depuis une vingtaine d'années, ainsi que la plus sanglante à avoir été revendiquée par l'EI en Europe.

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Des fleurs en hommage aux victimes de l'attentat du Crocus City Hall à Krasnogorsk, près de Moscou, le 25 mars 2024

AFP

L'attaque du 22 mars

Quelques heures après l'assaut, le groupe Etat islamique (EI), que la Russie combat en Syrie et qui est actif dans le Caucase russe, a revendiqué l'attentat. Les autorités russes ont affirmé que les 4 tueurs présumés tentaient de rejoindre le territoire ukrainien (lien archivé ici).

"Ils se dirigeaient vers l'Ukraine où, selon des données préliminaires (des enquêteurs), une 'fenêtre' avait été préparée pour qu'ils franchissent la frontière", avait accusé lors d'une allocation télévisée le président Vladimir Poutine le 23 mars, avant d'assurer que "ceux qui sont derrière ces terroristes seront punis" et qu'ils "n'auront pas un destin enviable".

Cette version des faits avait déjà été présentée un plus tôt par les services de sécurité russes (FSB), qui avaient également affirmé dans la matinée que les suspects avaient des "contacts" en Ukraine et comptaient s'y rendre, sans preuve de ces liens supposés. Ils avaient seulement indiqué avoir arrêté les quatre assaillants présumés dans la région de Briansk, frontalière de la Biélorussie et de l'Ukraine, alors qu'ils tentaient de s'enfuir à bord d'une voiture.

Une pluie d'accusations rejetées en bloc par l'Ukraine, qui a fustigé des propos "absurdes". "L'Ukraine n'a pas le moindre lien avec l'incident", avait martelé le conseiller de la présidence ukrainienne, Mykhailo Podoliak, le 23 mars. Dans la foulée de l'attaque, il avait déjà assuré que son pays n'avait "absolument rien à voir" avec cet "acte terroriste".

Le 25 mars au soir, Vladimir Poutine a reconnu pour la première fois que l'attentat avait été commis par des "islamistes radicaux", tout en continuant à sous-entendre un lien avec l'Ukraine.

Le 26 mars, le patron du FSB a à nouveau accusé l'Ukraine, cette fois associée à l'Occident, d'avoir facilité l'attentat près de Moscou. "Nous pensons que l'action a été préparée à la fois par des islamistes radicaux eux-mêmes et, bien entendu, facilitée par les services secrets occidentaux et que les services secrets ukrainiens eux-mêmes sont directement impliqués", a déclaré Alexandre Bortnikov, cité par l'agence de presse russe Ria Novosti.

L'attentat est survenu quelques jours à peine après la réélection de Vladimir Poutine à la présidence de la Russie, sans opposition pour six ans, alors qu'il avait promis la sécurité à ses concitoyens en pleine recrudescence des attaques en provenance d'Ukraine sur le sol russe.

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