Covid: non, une étude de Cambridge ne prouve pas que 25% des vaccinés développent le sida


Covid: non, une étude de Cambridge ne prouve pas que 25% des vaccinés développent le sida

Publié le mardi 9 janvier 2024 à 12:45

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Auteur(s)

Tommy WANG / Juliette MANSOUR / AFP Hong Kong

Malgré son efficacité prouvée contre les formes sévères du Covid, la vaccination est régulièrement remise en cause. En décembre, des internautes ont affirmé qu'une étude de l'université de Cambridge aurait conclu que "25% de toutes les personnes vaccinées" avec des injections à ARN messager souffriraient "désormais du syndrome d'immunodéficience acquise lors de la vaccination (SIDA)". C'est faux. Cette allégation récurrente depuis le lancement des différentes campagnes de vaccination reste infondée. Les vaccins n'affaiblissent pas le système immunitaire, mais au contraire le stimulent pour induire une protection contre le virus, rappellent les spécialistes, et aucun lien entre sida et vaccination anti-Covid n'a été établi. L'étude de Cambridge citée comme source est faussement interprétée, ont regretté ses auteurs auprès de l'AFP.

"Une étude explosive menée par d'éminents scientifiques de la célèbre université de Cambridge, en Angleterre, a conclu que 25% de toutes les personnes vaccinées avec des injections d’ARNm du Covid souffrent désormais du syndrome d'immunodéficience acquise lors de la vaccination (SIDA)", soutient un article de blog publié le 11 décembre sur le site Echelle de Jacob, qui déjà fait l'objet de plusieurs vérifications par l'AFP (1, 2).

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Capture d'écran prise le 05/01/2024

 

Des publications similaires ont circulé en anglais et en chinois, en japonais et en arabe.

Mais les experts interrogés par l'AFP ont expliqué que le "syndrome d'immunodéficience acquise lors de la vaccination" aussi appelé "VAID" par des internautes en anglais n'existe pas. 

"Il n'y a pas de 'VAID'", a réfuté Rachel Roper(archive ici), professeur de microbiologie et d'immunologie à l'Université East Carolina aux Etats-Unis interrogée en octobre 2023. "Toutes les données dans le monde montrent que les vaccins Covid sauvent des vies et n'augmentent pas les décès".

Jason McKnight (archive ici), enseignant au sein du Texas A&M College of Medicine, a également rejeté cette allégation, déclarant en décembre 2021 que "le syndrome d'immunodéficience acquise par le vaccin ou le VAID n'existe pas".

"L'affirmation selon laquelle les niveaux d'anticorps qui diminuent au fil des mois prouveraient l'existence du 'VAID' est fausse ; c'est simplement un phénomène naturel du système immunitaire que nous observons".

Affirmer que les vaccins anti-Covid pourraient causer une dégradation du système immunitaire est une rhétorique récurrente de la communauté anti-vaccins . Pour autant, cette allégation ne repose sur aucune preuve scientifique, et "n'a aucun sens", ont déjà expliqué à de nombreuses reprises des experts interrogés par l'AFP.

Au contraire, les vaccins contre le Covid autorisés en France stimulent le système immunitaire pour induire une protection contre le virus du Covid, même s'ils utilisent plusieurs techniques différentes pour y arriver (vaccins à ARN messager, ou à vecteur viral par exemple).

"Les vaccins n'ont aucun impact sur l'immunité naturelle", expliquait déjà en 2021  le professeur en immunopathologie Michel Moutschen, puisqu'ils s'appuient sur le système immunitaire pour compléter l'immunité innée avec l'immunité acquise, comme expliqué par exemple ici par les autorités sanitaires (archive ici).

Pour cette raison, "il n'y a aucun moyen que les vaccinations affaiblissent le système immunitaire", avait aussi abondé l'immunologiste Srđa Janković auprès de l'AFP, et encore moins qu'elles le "détruisent" à terme, selon Maja Stanojevic, virologue à l'Institut de microbiologie et d'immunologie de Belgrade et consultante auprès de l'Organisation mondiale de la santé.

Interrogé le 3 octobre 2023 par l'AFP, le Pr Jeffrey Cirillo (archive ici) martelait : "Clairement, la vaccination sauve des vies", mettant en avant que "le taux de mortalité des personnes vaccinées a été et continue d'être inférieur à 0,1 %, ce qui est bien mieux que celui de la population non vaccinée qui affiche un taux de mortalité d'environ 3 % dû à l'infection au SARS-CoV-2".

Des conclusions "tout simplement inventées"

L'étude britannique mentionnée dans les publications virales en guise de preuve est intitulée "N1-methylpseudouridylation of mRNA causes +1 ribosomal frameshifting", (lien archivé ici) mais elle ne prouve pas pas que la vaccination provoque une immunodéficience.

Ses auteurs, basés dans plusieurs universités britanniques, notamment à Cambridge et à Liverpool, ont expliqué à l'AFP que les conclusions tirées de leurs travaux étaient "tout simplement inventées".

L'étude, qui a examiné les effets du vaccin à ARN messager de Pfizer sur 21 personnes, a observé qu'un tiers des participants produisaient par la suite ce qu'ils nomment des "protéines involontaires" ("inintended proteins") et donc des réponses immunitaires à ces protéines. 

Cependant, l'auteur principal de l'étude, James Thaventhiran (archive ici), immunologue à l'université de Cambridge, a déclaré le 20 décembre 2023 à l'AFP que "les humains rencontrent régulièrement des protéines involontaires et génèrent des réponses immunitaires inoffensives".

"Dans le cas des vaccins contre le Covid, nos cellules fabriquent la protéine spike et notre système immunitaire produit des anticorps contre elle, nous protégeant ainsi d'une forme grave de la maladie. Les usines de microprotéines appelées ribosomes lisent les instructions de l’ARNm pour fabriquer des protéines. Ils lisent le code, par série de trois lettres chimiques à la fois. Chaque triplet pour un acide aminé – un seul bloc constituant une protéine. Le ribosome passe aux trois lettres suivantes et identifie quel acide aminé doit ensuite être ajouté à la protéine en croissance. Cela se répète jusqu'à ce qu'il atteigne la fin des instructions d'ARNm", a-t-il détaillé dans un article de The Conversation (archive ici).

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Présentation de la technologie des vaccins à ARN messager

AFP

 

"Alors d’où viennent les protéines involontaires? Elles sont créées de la même manière, mais des erreurs peuvent survenir [...]. Le ribosome peut [se tromper en lisant les lettres] ce qui entraîne la production d'une protéine différente", a poursuivi le chercheur dans le même article.

Mais, "il est important de noter que les humains sont régulièrement confrontés à des protéines involontaires et génèrent des réponses immunitaires sans danger, comme on le voit avec les protéines produites à partir de notre alimentation ou par des bactéries intestinales inoffensives. Ces réponses immunitaires, qui se produisent constamment chez chacun de nous, sont contrôlées par notre système immunitaire pour les empêcher de causer des dommages à notre corps", rappelle-t-il.

"Notre dernière étude ne remet pas en cause l'évaluation de la sécurité des vaccins à ARNm COVID existants", a-t-il encore déclaré auprès de l'AFP. "Les données sont claires : il n'existe aucune preuve reliant des protéines involontaires et des réponses immunitaires nocives."

Lance Turtle (archive ici), co-auteur de l'étude et chercheur au sein de l'université de Liverpool, a également déclaré que l'allégation partagée en ligne ne repose sur aucun fondement.

Elle "est tout simplement inventée", a-t-il déclaré auprès de l'AFP le 20 décembre 2023.

"Il n'y avait absolument rien sur l'immunodéficience dans notre étude… Il n'y a rien d'immunodéficient là-dedans, c'est le système immunitaire qui répond à une protéine étrangère."

L'AFP a déjà consacré plusieurs articles de vérification aux allégations infondées selon lesquelles la vaccination anti-Covid entraînerait une destruction du système immunitaire comme ici ou provoquerait le sida ici.

Dans ces articles, les experts interrogés rappellent que la sécurité des vaccins est surveillée de près par l'OMS et par l'Agence européenne des médicaments (archive ici) qui recensent et étudient tout effet indésirable survenu après l'administration d'un vaccin. En France, l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) assure également une surveillance des vaccins contre le Covid-19 et publie des points de santé réguliers (archive ici).

Statistiques relatives à une ou plusieurs déclaration(s) fact-checkée(s) par cet article

  • URL de la déclaration : https://echelledejacob.blogspot.com/2...
  • Texte de la déclaration :

    Une étude explosive menée par d’éminents scientifiques de la célèbre université de Cambridge, en Angleterre, a conclu que 25% de toutes les personnes vaccinées avec des injections d’ARNm du Covid souffrent désormais du syndrome d’immunodéficience acquise lors de la vaccination (SIDA).
    Selon l’étude, une personne sur quatre ayant reçu une injection d’ARNm Covid a subi une « réponse immunitaire inappropriée ».
    Alors que les scientifiques de Cambridge et les grands médias attribuent les dommages causés au système immunitaire à un « problème » ou à une réponse « involontaire », les experts tirent la sonnette d'alarme depuis un certain temps sur les effets sur le système immunitaire des individus.
    Slay News rapporte depuis longtemps de telles découvertes.
    « Les scientifiques de Cambridge ont découvert que les vaccins conduisaient parfois à la production de protéines absurdes, au lieu des protéines de pointe souhaitées, qui imitent l'infection et conduisent à la production d'anticorps », rapporte le UK Telegraph.
    "On pensait que la modification mineure de l'uridine ne causait aucun problème dans les cellules, mais une équipe de chercheurs de l'unité de toxicologie du Conseil de recherches médicales (MRC) de l'Université de Cambridge a maintenant découvert, lorsque ce code partiellement synthétique est lu, que le processus de fabrication de protéines dans le corps a parfois du mal avec les analogues de l’uridine.
    "Ces résultats ont été partagés avec le régulateur des médicaments MHRA, il y a environ un an, disent les scientifiques. Des vaccins mis à jour, qui utilisent la forme améliorée de l'ARNm, sont en préparation pour les vaccins contre le cancer et d'autres traitements", ajoute le rapport.
    Pendant ce temps, les médias s’efforcent de minimiser les résultats de l’étude.
    Un rapport du magazine Science a faussé les conclusions des scientifiques en affirmant que les protéines produites involontairement par les injections pourraient ne pas causer de dommages.
    Cependant, Science a publié un autre article en juillet confirmant que les injections contre le COVID-19 sont liées au VSIDA.

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