Non, la star de rumba congolaise Koffi Olomidé n’a pas été tuée


Non, la star de rumba congolaise Koffi Olomidé n’a pas été tuée

Publié le mercredi 17 novembre 2021 à 13:46

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Monique  Ngo Mayag, AFP République démocratique du Congo

Une publication partagée près de 4.500 fois sur Facebook depuis le 12 novembre 2021 annonce le décès du célèbre chanteur Koffi Olomidé -star de la scène congolaise- actuellement poursuivi en France pour agressions sexuelles. Mais l’artiste est bien en vie et l’a fait savoir dans une vidéo publiée sur ses comptes Facebook et Instagram.

L’auteur de la publication est péremptoire : "Aujourd'hui-12 novembre 2021- est un jour sombre pour le monde musical. L'artiste chanteur Koffi Olomidé a été abattu dans son domicile par des malfrats qui ont fait irruption dans sa maison", affirme-t-il, ajoutant que le chanteur "a voulu s'opposer à eux". Ce message, posté  notamment dans un groupe Facebook de plus de 500.000 membres, y a été partagé quelque 4.300 fois. On le retrouve aussi ici ou là .

2021111810-f25fa753cfce0686b35333e3b8a75cdd.jpegCapture du post viral sur Facebook réalisée le 17 novembre 2021

Mais c'est faux. Le chanteur a répondu le 15 novembre à cette rumeur via une vidéo au ton ironique.

Dans la séquence de 26 secondes sur ses comptes certifiés sur Facebook et Instagram, Koffi Olomidé apparaît hilare. "Koffi a été abattu chez lui, nous sommes en deuil. Ah, les jaloux, vous êtes abattus hein", lâche -t-il en pouffant de rire plusieurs fois.

La légende accompagnant la vidéo ajoute : "C'est du n'importe quoi, les ami-e-s".

 

 

Poursuivi pour agressions sexuelles

Ces messages sur son prétendu décès sont apparus au moment où la star de la rumba congolaise est poursuivie en France pour agressions sexuelles et séquestration. Comme le rapporte cette dépêche AFP, "huit ans de prison ferme ont été requis lundi 25 octobre contre la star de la rumba congolaise Koffi Olomidé, jugé en appel à Versailles pour agressions sexuelles et séquestration sur quatre de ses ex-danseuses". 

Le jugement a été mis en délibéré au 13 décembre.

Quatre femmes congolaises, qui ont déposé plainte entre 2007 et 2013 et sont parties civiles au procès, accusent le chanteur de les avoir enfermées dans un pavillon gardé près de Paris, lors de ses tournées françaises, et de les avoir forcées à avoir des relations sexuelles avec lui, de façon régulière pour certaines. 

Elles ont déclaré avoir été forcées à subir des relations sexuelles "plusieurs fois" puis "trois fois par semaine" pour l'une ou "trois ou quatre fois dans le mois" pour une autre. "Je me suis laissée faire, mais je n'avais pas envie", a expliqué l'une d'elles à la barre, son avocat Me David Desgranges parlant d'"emprise" du chanteur sur ses troupes. 

Le chanteur nie ces accusations. 

2021111810-8ff80ffcc5a06d20f9839578e1cecfa6.jpegKoffi Olomidé et son avocat au tribunal de Versailles le 25 octobre 2021 ( AFP / BERTRAND GUAY)

Des rumeurs sur une récente incarcération

C'est également dans ce contexte judiciaire qu'une publication mise en ligne le le 11 novembre 2021 et partagée près de 6.000 fois laisse croire qu'il a été arrêté récemment, utilisant en réalité des images datant de 2016, et qui concernent une affaire de coup de pied porté par le chanteur à l'une de ses danseuses.

"Arrestation de Koffi Olomidé pourquoi", dit la légende. Sur la vidéo, de mauvaise qualité, on distingue une foule devant un pickup de police transportant une dizaine de personnes à l’arrière. Une voix s’exprime en français et en lingala (langue nationale de la République démocratique du Congo) sur la vidéo. "Ba ké na yé prison" (on l’emmène en prison), dit-elle (0’20”). 

2021111810-2fc6927e579b9bfe8ae771843658bee1.jpegCapture d’écran d’une publication Facebook réalisée le 17 novembre 2021

Mais cette vidéo date de 2016, ce que ne précise pas la publication, laissant croire que la scène est récente.

En effectuant une recherche d’image inversée avec l’une des captures d’écran de la vidéo, nous retrouvons en effet un reportage de TV5 Monde de fin juillet 2016. L'événement est filmé sous un angle différent de celui de la vidéo virale mais la scène est reconnaissable. On y voit de plus le chanteur s'engouffrer dans une des voitures au début du reportage.

On y retrouve la même foule bruyante, les mêmes pickup de police. On y voit aussi le même feuillage qui jouxte le mur. 

2021111810-51231963f45d533e32e598483971011f.jpegCapture d'écran du reportage-vidéo sur information.tv5monde.com

2021111810-5f40deab408701492daa5f32a1c52ad3.jpegCapture d'écran de la vidéo virale sur Facebook, réalisée le 17 novembre 2021

 

2021111810-213a7077940fb17e22a25b3b176f4247.jpegCapture d'écran du reportage-vidéo sur information.tv5monde.com

2021111810-3b1f2062d2b5f316394df20fc3364fd2.jpegCapture d'écran de la vidéo virale sur Facebook, réalisée le 17 novembre 2021

 

"Koffi Olomidé a été arrêté ce matin à son domicile de Kinshasa", annonce la présentatrice du journal avant de lancer le reportage. Une dépêche AFP en date du 26 juillet 2016 relate l'arrestation. Il avait dans la foulée été emprisonné  et inculpé pour "coups et blessures volontaires". 

Quant au reportage de TV5Monde, il montre le chanteur mené du tribunal à la prison .

"… Pas un geste à la foule de curieux et d'admirateurs qui a passé une partie de l'après-midi à l’attendre devant le tribunal de grande instance de la Gombe. Koffi Olomidé est emmené sous bonne escorte à la prison centrale de Makala", dit la journaliste dans son commentaire. 

Antoine Agbepa Mumba, alias Koffi Olomide, avait été expulsé le week-end précédent du Kenya, où il devait donner un concert, après avoir été filmé la veille à son arrivée à l'aéroport de Nairobi en train de donner un violent coup de pied à l'une de ses danseuses. Largement relayée par les réseaux sociaux, la vidéo de la scène a provoqué une vague de condamnations, avait expliqué l'AFP à l'époque. 

On retrouve aussi ici début novembre 2021 sur un site béninois les images publiées de 2016 présentées à tort comme le "Film de l’embarquement de koffi Olomidé pour la prison” (8 ans ferme)". 

"L’affaire d’agressions sexuelles contre le grand Mopao a finalement connu son épilogue. Le grand artiste congolais est fixé sur son sort. Il a été conduit en prison où il passera les huit (08) prochaines années sous forte escorte policière. La population est sortie massivement pour assister à l’événement. Voici la vidéo de son embarquement", affirme le site de façon erronée.

On peut constater que le site mélange plusieurs affaires -celle du coup de pied en 2016 et celle des agressions sexuelles jugée en appel en France en 2021. De plus, Koffi Olomidé n'a pas été condamné à 8 ans de prison : il s'agit de la peine requise contre lui fin octobre, aucune peine n'a encore été prononcée puisque le jugement est en délibéré jusqu'au 13 décembre.

Une longue carrière et des procès pour agressions

2021111810-2e59f2955d90135ad6faa65215a0c92c.jpegKoffi Olomide (au centre) quitte le tribunal le 16 août 2012 après qu'il a été condamné à trois mois de prison avec sursis lors d'un procès pour "coups et blessures" sur un producteur congolais. ( AFP / JUNIOR KHANNA)

Comme le rappelle cette dépêche AFP, la carrière de Koffi Olomidé, 65 ans, est ponctuée de poursuites judiciaires. En 2012, il avait écopé de trois mois de prison avec sursis pour "coups et blessures" sur son producteur. 

Sur l’affaire en cours qui l’oppose à quatre de ses anciennes danseuses, en première instance, le tribunal de Nanterre l'avait condamné en mars 2019 à deux ans de prison avec sursis pour "atteinte sexuelle" sur l'une de ces jeunes femmes, déclarée mineure au moment des faits. Le ministère public, qui avait requis sept ans d'emprisonnement ferme, avait fait appel de cette condamnation. Le chanteur avait été relaxé des poursuites concernant trois des danseuses. Le ministère public avait fait appel de cette décision, entraînant le procès en appel, dont le jugement est attendu le 13 décembre. 

Malgré ce contexte, le chanteur poursuit ses spectacles. Il a annoncé, affiche à l’appui, une série de spectacles fin novembre pour les 35 ans du Quartier Latin, l’orchestre qu’il a fondé à ses débuts et qui constitue une pépinière de jeunes chanteurs congolais. La liste de ses tubes est aussi longue que les surnoms dont il s'est affublé au fil des décennies : "Mopao Mokonzi", "Koraman","Effrakata", etc. 

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