Est-ce que nous sommes vraiment trois millions de plus à faire du sport en France, comme l'affirme la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra ?


Est-ce que nous sommes vraiment trois millions de plus à faire du sport en France, comme l'affirme la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra ?

Publié le mercredi 10 janvier 2024 à 10:41

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Antoine Deiana - franceinfo

Radio France

Amélie Oudéa-Castéra, ministre des Sports se félicite de cette hausse à quelques mois des Jeux Olympiques de Paris. Ce chiffre se base sur le baromètre de l'INJEP, mais ne prend pas en compte nos nouvelles façons de faire du sport à domicile et la baisse importante du nombre de licences délivrées.

Le candidat et futur président de la République, Emmanuel Macron, en 2017, promettait d'augmenter de trois millions (+ 10 %) la base de sportifs réguliers en France. Six ans plus tard et à quelques mois des Jeux Olympiques de Paris, c'est chose faite et la ministre des Sport s'en félicite sur le plateau des 4 Vérités de France 2, mercredi 3 janvier : "Le président de la république avait dit, en 2017, qu'il voulait trois millions de pratiquants de sport supplémentaires réguliers. On les a, aujourd'hui, on est au rendez-vous." Bien que ce chiffre soit vrai, selon un baromètre de l'INJEP, il faut préciser qu'il indique aussi que c'est surtout la pratique du sport à domicile qui a évolué. Le nombre de licences délivrées, qui est en baisse et qui est un facteur important, n'est pas évoqué dans cette enquête.

Trois millions de sportifs en plus depuis 2018, selon un baromètre

Depuis 2018, l'INJEP, l'institut national de la jeunesse et de l'éducation population, s'intéresse à l'évolution de l'activité sportive des Français de 15 ans et plus. L'institut publie chaque année ses conclusions avec son baromètre national sur les pratiques sportives des Français (les derniers chiffres pour 2023 sortent jeudi 11 janvier, mais franceinfo a déjà pu les consulter).

On constate que la proportion des pratiquants, dits réguliers, c'est-à-dire qui pratiquent l'une des 106 disciplines proposées par l'enquête au moins une fois par semaine, est passée de 54% en 2018 à 59% en 2023. Nous avons fait le calcul et cela représente bien environ trois millions de sportifs en plus.

Le sport à domicile de plus en plus pratiqué

Dans le détail de ce baromètre, on constate que c'est la marche et la randonnée qui participent largement à cette hausse, pour plus de la moitié des pratiques sportives déclarées par les personnes interrogées. Mais ce qui marque surtout dans l'enquête menée par l'INJEP, c'est qu'on constate une évolution des façons de pratiquer du sport. Un peu plus de deux Français sur dix pratique une activité principalement à domicile. Particulièrement développée pendant la crise sanitaire (47% des pratiquants en 2020), la pratique à domicile a reflué en 2022 et 2023, mais reste à un niveau supérieur à celui de 2018 (22%, soit + 4 points par rapport à 2018). 

A contrario, la pratique dans un club ou une association est en recul, elle concerne 21% des pratiquants en 2022 et en 2023, contre 24% en 2018. 

Le nombre de licences, meilleur indicateur, mais qui n'apparaît pas dans le baromètre

Il y a un indicateur qui n'apparaît presque pas dans le baromètre de l'INJEP, cité par Amélie Oudéa-Castéra, c'est l'évolution du nombre de licences délivrées entre 2018 et 2022. Pourtant, selon une étude conduite par le CDES de Limoges, pilotée conjointement par l'ANDES et l'Agence nationale du Sport et validée par le ministère des Sports, "les licences sportives sont l’indicateur longitudinal le plus stable pour observer ces tendances sur la pratique sportive des Français."

Si l'on regarde cet indicateur justement, on constate qu'entre 2018 et 2022, on compte environ un million de licences délivrées en moins. À noter néanmoins, qu'au cours de la saison 2022, le nombre de licences annuelles s’élève à 15,4 millions, soit une augmentation de 19,4% sur un an après une perte de 3,5 millions entre 2019 et 2021 (-21,2%). Le nombre de licences annuelles délivrées demeure inférieur (-5,9%) à celui de 2019, car les effets des restrictions sanitaires n’ont pas été totalement compensés.