Malgré l’appel du Pape à Marseille à un «sursaut de conscience» sur l’accueil des migrants, l’Europe n’aurait pas à rougir de son action en la matière. C’est tout du moins ce qu’a laissé entre le Président, interrogé dimanche soir sur la question migratoire lors de son interview télévisée sur TF1 et France 2. «L’Europe est le continent qui fait le plus», a-t-il ainsi affirmé.

Pourtant, les chiffres officiels du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) le montrent depuis des années : le continent européen (hors Turquie) est loin d’accueillir le plus grand nombre de réfugiés. Précisons que l’UNHCR emploie une définition large du terme de «réfugié», qui renvoie à toutes les personnes déplacées de force, avec ou sans la reconnaissance officielle de ce statut.

«L’exode de réfugiés le plus rapide depuis la Seconde Guerre mondiale»

Fin 2022, l’Allemagne était le seul pays de l’Union européenne à apparaître dans le top 5 des pays à avoir accepté le plus de réfugiés. Avec 2,1 millions d’exilés accueillis, elle figure à la quatrième place, devant le Pakistan. La Turquie est toujours en tête des pays recevant le plus de personnes déplacées de force, avec 3,6 millions de réfugiés entrés sur son territoire. Viennent ensuite l’Iran (3,4 millions de personnes) et la Colombie (2,5 millions). Dans les faits, l’UNHCR relève que 70 % des exilés sont accueillis par des pays voisins, dont les trois quarts sont des Etats «à revenus faibles ou intermédiaires». «La plupart des personnes qui fuient un conflit ou la persécution restent près de leur pays d’origine», rappelle par ailleurs le Haut-Commissariat.

Auprès de CheckNews, l’Elysée reconnaît sans mal que les pays voisins des Etats en conflits sont les plus sollicités en cas de forte migration. Si ce constat concerne avant tout des pays extra-européens, la présidence souligne l’effort consenti par l’Europe pour accueillir les Ukrainiens depuis le début du conflit, il y a un an et demi. «L’Europe est une terre d’accueil qui continue ces dernières années à montrer l’exemple en matière de solidarité. Depuis le début de l’agression russe contre l’Ukraine, en février 2022, l’Europe a accueilli le plus grand nombre de personnes fuyant la guerre depuis la Seconde Guerre mondiale. Comme dans les cas des autres conflits et crises dans le monde, ce sont en effet dans les pays voisins de l’Ukraine que les populations fuyant les violences se sont réfugiées en priorité», répond l’Elysée. A noter que d’après l’UNHCR, les Ukrainiens représentent 16 % du total des personnes contraintes de fuir. C’est «l’exode de réfugiés le plus rapide depuis la Seconde Guerre mondiale», observe l’UNHCR.

En France, seulement 91 910 Ukrainiens sur les 4 millions accueillis en Europe

L’Elysée insiste aussi sur les conditions d’accueil qui, au sein de l’Union européenne, vont – théoriquement – de pair avec la protection accordée par l’asile. «Ainsi, plus de 4 millions d’Ukrainiens sont accueillis dans l’UE et bénéficient de la protection temporaire qui donne accès à l’hébergement, à la santé, à un accompagnement social et la possibilité de travailler», nous indique-t-on. En France, «les modalités d’étude des demandes, tout comme l’accueil des personnes éligibles à l’asile ou à la protection temporaire, s’inscrivent dans le plein respect de nos valeurs humanistes européennes», ajoute la présidence, sans s’exprimer pour autant sur le sort des migrants arrivés par milliers à Lampedusa il y a une quinzaine de jours.

Précisons que, selon les données d’Eurostat, la France a accordé la protection temporaire à 91 910 Ukrainiens depuis mars 2022, soit 1,3 Ukrainien pour 1 000 habitants. C’est bien moins que l’Allemagne, avec 4,5 réfugiés d’Ukraine pour mille habitants (données partielles), que l’Espagne (3,7 pour mille) ou encore que l’Italie (2,8 pour mille). Ce qui s’explique notamment en raison de l’éloignement culturel et géographique, comme CheckNews le notait dans un article daté de novembre 2022, qui plaçait alors la France au dernier des pays européens en matière d’accueil de réfugiés ukrainiens.