Sur quoi s’appuient les soutiens de Christophe Béchu pour affirmer qu’Angers est «la ville la plus verte» de France ?


Sur quoi s’appuient les soutiens de Christophe Béchu pour affirmer qu’Angers est «la ville la plus verte» de France ?

Publié le jeudi 7 juillet 2022 à 16:29

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Christophe Béchu.

(Geoffroy Van Der Hasselt/AFP)

Auteur(s)

Marie Thimonnier

«L’Observatoire des villes vertes» classe Angers en tête. Mais ce palmarès, un parmi d’autres, ne concerne que la gestion des espaces verts et non l‘ensemble de la politique écologique municipale.

Le maire d’Angers, Christophe Béchu, qui avait d’abord intégré le gouvernement en mai, en tant que ministre délégué en charge des Collectivités territoriales, a pris du galon, ce lundi, en devenant ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Il remplace à ce portefeuille stratégique la sortante Amélie de Montchalin, battue aux législatives dans l’Essonne.

La nomination à ce poste du secrétaire général d’Horizons, le parti de l’ancien Premier ministre Edouard Philippe, a fait réagir plusieurs personnalités politiques de l’opposition, qui soulignent son manque de considération pour la cause écologique. «Une chose est déjà certaine : jamais croisé Christophe Béchu sur la moindre lutte écologiste», lance sur Twitter la députée d’Europe écologie les verts (EELV) et Nupes, Sandrine Rousseau. «Je veux bien que tout le monde se dise écologiste mais Christophe Béchu, le nouveau ministre, est davantage connu pour ses propos contre le mariage pour tous que pour son adhésion à la planification écologique»réagit également Adrien Quatennens, député du Nord et coordinateur de la France Insoumise.

En réponse, plusieurs soutiens de Christophe Béchu et de la majorité se sont manifestés. Un argument revient souvent : Angers est dans le «top» des villes vertes françaises. «Angers (dont Christophe Béchu est maire depuis 2014) est la ville la plus verte de France depuis plusieurs années, notamment pour sa végétalisation», souligne sur Twitter, Maxime Hérault, porte-parole des Jeunes avec Macron. L’adjoint à la mairie d’Angers, Benjamin Kirschner, fait la même démonstration, dans sa réponse à Sandrine Rousseau sur le réseau social : «C’est normal, il (Christophe Béchu) parle moins que vous, mais agit plus. Il ne fait pas d’écologie de plateaux TV mais du quotidien (Angers 1re ville verte de France, ville pionnière de la revégétalisation, plan vélo, NPNRU, assises de la transition écologique…)».

Observatoire des villes vertes

Ces arguments renvoient à une classification réalisée par l’Observatoire des villes vertes, fondé en 2014 par l’Union nationale des entreprises du paysage, organisation professionnelle du secteur paysagiste et Hortis, association des professionnels des espaces verts en ville. Selon le dernier classement publié en 2020, l’observatoire plaçait Angers en tête, devant Nantes et Metz, respectivement en 2e et 3e positions, comme le montre cette capture d’écran postée par un compte de soutien à la majorité.

Un problème est toutefois pointé par certains internautes : depuis la nomination du maire d’Angers au gouvernement, le site de l’Observatoire était en maintenance. Interrogée par CheckNews, l’organisation répond que son site «fait peau neuve». Cette «mise à jour» n’a «aucune corrélation avec la nomination de Monsieur Christophe Béchu», précise l’observatoire, qui assure que celle-ci était «planifiée depuis plusieurs mois». Le site est, depuis, de nouveau accessible.

Publié tous les trois ans, le palmarès a donné Angers 1er et Nantes 2e à trois reprises, en 2014, 2017 et 2020. Pour ce qui est de la troisième ville, le classement a un peu évolué, avec dans l’ordre chronologique, Limoges, Strasbourg et Metz. Le dernier en date a été repris par plusieurs médias depuis sa publication, comme Le ParisienCanal + ou le quotidien régional Ouest France.

Comment est réalisé ce classement ? En «interrogeant les 50 plus grandes villes de France (liste établie selon le nombre d’habitants, recensement Insee)», répond l’Observatoire à CheckNews. «L’enquête s’appuie sur le traitement extensif de plus de 1 500 données, collectées selon 2 sources principales : données publiques et questionnaires déclaratifs remplis par les services «Espaces Verts» des villes concernées». La classification se fait ainsi d’après des données de recensement et de gestion des espaces verts fournies par les mairies elles-mêmes.

Ce palmarès ne concerne donc que les espaces verts et non pas l’ensemble de la politique municipale en matière d’écologie. Par exemple, il ne prend pas en compte des données liées à la gestion des déchets, à l’énergie ou encore aux transports.

Manifeste signé par Béchu

A noter également que le nom de Christophe Béchu apparaît sur le site de l’Observatoire, dans la page «à propos», parmi les signataires d’un manifeste «pour une ville végétale et durable». Dans ce texte, rédigé et publié juste après la création de l’association, en juin 2015 - «6 mois avant la COP21», précise l’organisation -, l’Observatoire ainsi que «d’autres acteurs français du paysage» y interpellent «les élus et décideurs publics aux niveaux local, national et international sur le potentiel largement inexploité du végétal et des jardins pour lutter contre le réchauffement climatique». Le maire d’Angers était donc sur la liste des signataires dès sa publication.

Interrogé par CheckNews au sujet du lien entre Christophe Béchu et l’Observatoire, ce dernier explique : «Plante & Cité, dont l’objet est de mener des études et expérimentations, notamment sur le développement de la nature en ville, a été associée à ce manifeste par la voix de son président à cette date, Christophe Béchu. Tout comme d’autres organisations l’ont été, l’Elca, Orée ou encore Hortis». Et ajoute que son action s’est limitée «uniquement à signer ce manifeste, aux côtés d’autres personnalités engagées pour renforcer la place du vert en ville». Le maire d’Angers est, en effet, président de l’association Plante & Cité, organisme national d’études et d’expérimentations destiné aux professionnels des espaces verts, entreprises et collectivités territoriales. Ce lien établi en 2015 n’aurait cependant aucune influence sur les classements réalisés et pour lesquels «l’intervention des villes se résume au remplissage d’un questionnaire».

Sur sa collaboration actuelle avec le nouveau ministre de la Transition écologique, la réponse de l’organisation est claire : «M. Béchu n’est pas affilié à l’Observatoire et ne collabore pas avec lui.»

Tout dépend des critères retenus

Il existe à ce jour plusieurs classements sur ce thème des villes «vertes» et tous ne donnent pas les mêmes résultats. Forbes publie en juin 2020 - la même année que celui de l’Observatoire, le palmarès de Holidu, le moteur de recherche de locations de vacances. L’étude est réalisée à partir des villes avec la plus grande superficie de parcs par personne, données obtenues via la base OpenStreetMap et rapportées au nombre d’habitants. Résultat, Dijon se place en tête, devant Le Mans et Rennes qui complètent le podium. Brest et Lille terminent en 4e et 5e positions. Angers n’apparaît pas dans les dix villes citées.

Le comparateur d’assurance et d’énergie en ligne, Le Lynx, a également établi son classement des villes les plus «vertes» en décembre 2021, en recensant trois critères : les espaces boisés (forêts), les espaces verts urbains (parcs, jardins ou aires de loisirs) et les espaces de végétations herbacées. Ensuite, «sur la base de ces chiffres, un indice a été créé», afin de dresser le palmarès. Résultats inédits de nouveau, Nice passe en tête, devant Ajaccio et Fréjus. Enfin, Marseille et Cannes complètent le top 5.

Ces trois classements, tous réalisés dans le même objectif de déterminer les villes les plus «vertes» de France, montrent néanmoins que les résultats divergent en fonction des critères retenus pour établir l’étude. Ainsi, il est difficile de qualifier Angers comme la «ville la plus verte de France» sur la base du seul classement de l’Observatoire des villes vertes.