Dire que la France n’émet qu’1% du CO2 mondial pour justifier l’inaction climatique est trompeur
Dire que la France n’émet qu’1% du CO2 mondial pour justifier l’inaction climatique est trompeur
Publié le lundi 11 décembre 2023 à 10:40
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AFP France
L’idée selon laquelle les émissions de dioxyde de carbone (CO2) de la France représenteraient une part tellement infime des émissions mondiales que cela l’exonèrerait d’agir pour le climat est tenace parmi les climatosceptiques. Mais elle est trompeuse : pour avoir une idée de l’ampleur de son impact sur le réchauffement mondial, il faut tenir compte de l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre (GES) produits par la France, pas seulement du CO2. Et ses émissions annuelles par habitant sont supérieures à la moyenne mondiale.
Les émissions de CO2 sont une partie des émissions de GES
Il faut compter l’ensemble des émissions de GES : le CO2 (78%) mais aussi le méthane (15%) et le protoxyde d’azote (7%) (Source : Service des données et études statistiques - Sdes - du ministère de la Transition écologique).
Et outre les GES émis en France, il faut aussi inclure tous ceux émis à l’étranger pour la production de biens ensuite importés et consommés en France (Source : définition Insee de "l’empreinte carbone").
Par exemple, une paire de chaussures fabriquées en Chine a un impact environnemental là-bas, mais aussi pour l’acheminer jusqu’au consommateur français puis la traiter lorsqu’elle est hors d’usage
Cette empreinte carbone est exprimée en "tonnes équivalent dioxyde de carbone" (t éqCO2) : afin de pouvoir comparer les émissions des différents gaz à effet de serre, leurs quantités sont converties en quantités équivalentes de dioxyde de carbone.
Une part de 0,8% des émissions mondiales de C02 et de 1,1% de celles de GES
Si l’on ne compte que le CO2 émis sur le territoire national, la part de la France dans les émissions mondiales était de 0,82% en 2021, soit 305,96 millions de tonnes (Source : Our world in data.)
Tous gaz à effet de serre confondus, les émissions de la France issues du seul territoire national étaient en 2022 de 403,8 millions de t éqCO2 (Source : Haut conseil pour le climat).
Mais lorsque l’on inclut les émissions liées aux échanges internationaux de la France, le chiffre monte à 604 millions de t éqCO2 en 2021, dernière année pour laquelle le Haut conseil pour le climat dispose d'une estimation de l'empreinte carbone française.
L'empreinte carbone de la France a toutefois baissé de 9% par rapport à 1995
Si l’on s’en tient à ces 604 millions de t éqCO2 d’émissions de GES, la France représentait en 2021, selon les calculs de l’AFP, environ 1,1% des 52,8 gigatonnes (un milliard de tonnes) éqCO2 émises au niveau mondial (Source : Programme des Nations unies pour l’environnement - PNUE).
Mais à l’échelle de l’Union européenne, la France était le deuxième pays émetteur de GES en 2022, derrière l’Allemagne, avec 12% des émissions européennes (21,9% pour l’Allemagne), et devant la Pologne (11,2%) (Source : Commission européenne).
Des émissions de gaz à effet de serre par habitant supérieures à la moyenne mondiale
Il est également important de tenir compte des différences de populations, car cela influe sur l’empreinte carbone.
Le meilleur indicateur pour mesurer l’impact d’un pays sur le réchauffement global est donc le niveau d’émissions par habitant
La France se classe au-dessus de la moyenne mondiale, avec 8,9 t éqCO2 par personne en 2021 (Source : Haut conseil pour le climat) pour une moyenne mondiale de 6,76 t éqCo2 en 2022 (Source : PNUE).
Ces 8,9 t éqCO2 françaises représentent toutefois une baisse de 20% par rapport aux 11,2 t éqCo2 de 1995 (Source : Sdes).
Dans son sixième rapport d'évaluation paru en 2023, le Giec, chargé depuis 1988 d'évaluer l'ampleur, les causes et les conséquences du changement climatique en cours, a exposé une séries de réponses pour minimiser l'impact que pourrait avoir le dérèglement climatique sur notre environnement. Selon eux, bien que certains effets soient désormais irréversibles, il est encore temps d'agir pour atténuer l'impact du réchauffement climatique sur nos sociétés et écosystèmes.
Aussi, l'idée selon laquelle une action de la France serait inutile est selon le climatologue Jean Jouzel"un raisonnement complètement biaisé ". En outre, la France doit occuper une place centrale dans lutte contre le réchauffement climatique du fait de la "responsabilité historique" qu'elle revêt, affirme Françoise Vimeux, climatologue et directrice de recherche à l'Institut de Recherche pour le Développement.
La France 12e pays le plus émetteur de CO2 depuis la Révolution industrielle
Comme les GES restent dans l’atmosphère et le réchauffent pendant plusieurs décennies voire plusieurs siècles, il faut aussi s’intéresser aux émissions cumulées.
Là encore, la France figure parmi les pays plus gros émetteurs historiques : le 12e en 2021, avec 38,5 milliards de tonnes de CO2 émises sur la période
(Source : Carbon Brief)
Les plus gros émetteurs de dioxyde de carbone sont les Etats-Unis (420 gigatonnes), la Chine (241,8 gigatonnes) et la Russie (117,3 gigatonnes).
Au niveau mondial, les engagements des pays signataires de l'Accord de Paris en matière de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre s'avèrent insuffisants pour atteindre les objectifs nécessaires pour limiter le réchauffement climatique, comme le montre le graphique ci-dessous :
Archives des liens de cette fiche :
Service des données et études statistiques du ministère de la Transition écologique
Programme des Nations unies pour l’environnement
Retrouvez les articles de vérification de l'AFP sur le sujet des émissions de gaz à effet de serre de la France :
La France qui émet moins d'1% du CO2 mondial : attention à ce chiffre sorti de son contexte
Le raccourci de Renaissance sur les émissions de CO2 de la France
Attention à ces chiffres sur la pollution émise par les deux-roues motorisés en France
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