Les CDC américains n'ont pas "averti que les vaccins anti-Covid peuvent réduire l'espérance de vie de 24 ans"


Les CDC américains n'ont pas "averti que les vaccins anti-Covid peuvent réduire l'espérance de vie de 24 ans"

Publié le mercredi 29 mars 2023 à 09:07

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(AFP)

Auteur(s)

Nahiara S. Alonso, Juliette MANSOUR, AFP Etats-Unis

Deux ans après le lancement de la vaccination anti-Covid, des publications assurent qu'une comparaison des données publiées par les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) américains sur le taux de mortalité entre 2021 et 2022 ont "montré que les vaccins anti-Covid peuvent réduire l'espérance de vie jusqu'à 24 ans". Mais ces allégations sont fausses, ont réfuté les CDC et des spécialistes interrogés par l'AFP, qui pointent que l'agence n'avait pas, en mars 2023, publié cet indicateur pour l'année 2022. De plus, l'agence de santé assure, dans une vaste étude récemment publiée, n'avoir "constaté aucune augmentation du risque de décès chez les personnes ayant reçu les vaccins anti-Covid de Pfizer, Moderna et Johnson & Johnson", mais avoir, à l'inverse, observé "un taux de mortalité inférieur chez les personnes vaccinées que chez celles n'ayant pas reçu d'injection".

"Le CDC avertit que plusieurs piqûres COVID 'diminuent la durée de vie de 24 ans'", titre un article du blog 1Scandal.com publié le 10 février 2023.

"Les données du CDC révèlent que plusieurs vaccins Covid peuvent réduire jusqu'à 24 ans la durée de vie des vaccinés", prétend de son côté un autre article de blog publié le 13 février sur le site Cogiito, relais fréquent d'infox.

d7e3d84dc8fe3cae76631cbe98e80efa483cc23e-ipad.jpgCapture d'écran prise sur le blog Cogiito le 20/03/2023

8c4d12fc05dc88ee6464b3ced1fa6bcf2ad51e2f-ipad.jpgCapture d'écran prise sur le blog 1Scandal le 20/03/2023

Ce message, en français, cite des articles de blog en anglais publiés début février 2023 sur les sites The Exposé et Natural News et relayant des allégations similaires.

Les deux pages prétendent que "les données de mortalité toutes causes confondues des CDC montrent que chaque dose de vaccin a augmenté la mortalité de 7% en 2022 par rapport à la mortalité en 2021".

Les pages françaises concluent qu'"un homme de 30 ans qui a pris quatre injections de covid ne vivra, en moyenne, que jusqu'à 56 ans, selon les données américaines" et que "si ce même homme de 30 ans reçoit une cinquième injection de covid, il aura perdu 24 ans d'espérance de vie".

Les données sur la mortalité non publiées pour 2022

Néanmoins, ces allégations sont infondées, ont estimé plusieurs experts interrogés par l'AFP et les CDC, qui forment la principale agence fédérale des États-Unis en matière de protection de la santé publique.

Et ce, pour plusieurs raisons.

Les publications assurent ainsi s'appuyer sur les données des CDC en comparant les taux de mortalité de l'année 2022 par rapport à 2021. C'est impossible : les CDC "n'ont pas encore communiqué de données sur la mortalité pour l'année 2022" et "les dernières datent de 2021", a relevé le 9 mars 2023 John Grabenstein, épidémiologiste et membre de l'Immunization Action Coalition.

99a3397463cf965d61dd72a528aeddf9c32928b6-ipad.jpgCapture d'écran prise sur le site des CDC le 21/03/2023

L'AFP n'a pas pu retrouver la trace du chiffre de 7% cité dans les publications virales.

En outre, au-delà de ce chiffre, les publications établissent un lien causal entre vaccination et mortalité dans leur analyse.

Or, "les données sur la mortalité toutes causes confondues incluent les décès par surdoses de médicaments, les accidents de la route, les suicides et bien d'autres facteurs qui n'ont manifestement rien à voir avec la vaccination, donc il ne s'agirait pas, même s'il était disponible, d'un indicateur spécifique", a poursuivi l'épidémiologiste.

Richard M. Watanabe, professeur de biostatistiques à la Keck School of Medicine de l'Université de Californie du Sud, a abondé auprès de l'AFP le 9 mars : "Je n'ai connaissance d'aucune donnée des CDC suggérant une réduction de l'espérance de vie associée à la vaccination anti-Covid ou tout autre vaccin".

Contactés par l'AFP le 20 mars 2023, les CDC ont également démenti ces allégations et renvoyé vers une étude américaine publiée en janvier 2023 dans la revue Vaccine.

Ces travaux concluent à une absence de risque accru de mortalité hors Covid-19 parmi les personnes vaccinées, quel que soit le vaccin (Pfizer, Moderna et Janssen), par rapport aux personnes non-vaccinées.

Cette étude a été menée à une plus grande échelle que les études précédentes sur le sujet, puisqu’elle a porté sur plusieurs millions d’individus, 3% de la population américaine, sur une durée de plusieurs mois, entre décembre 2020 et août 2021. Les personnes enrôlées dans cette étude avaient des profils très différents, puisqu'elles ont été recrutées au sein du Centre de pharmacovigilance des vaccins américain, qui appartient aux CDC, dans différents Etats. Le taux de mortalité huit mois après le début de l’étude était de 0,76% pour les personnes ayant reçu une dose de vaccin, 0,66% pour celles ayant reçu deux doses, et 1,76% pour les personnes non-vaccinées.

Citant ces travaux, l'agence sanitaire américaine a affirmé auprès de l'AFP que "dans l'une des plus vastes études de ce type menées à ce jour, les CDC n'ont pas constaté d'augmentation du risque de décès chez les personnes ayant reçu les vaccins COVID-19 de Pfizer-BioNTech, Moderna et Johnson & Johnson. Les taux de mortalité chez les personnes vaccinées contre le Covid étaient inférieurs à ceux des personnes n'ayant pas reçu d'injections".

"Les résultats de cette étude devraient rassurer les personnes susceptibles de se faire vacciner contre le Covid-19 et les soignants quant à l'innocuité de ces vaccins. Ces résultats vont également à l'encontre des affirmations infondées selon lesquelles les vaccins anti-Covid auraient causé de nombreux décès", ont poursuivi les CDC.

Sur leur site, les CDC recommandent la vaccination anti-Covid à partir de six mois et assurent que les vaccins distribués aux Etats-Unis sont "sûrs et efficaces et réduisent le risque de faire une forme grave de la maladie ".

Les autorités sanitaires du monde entier continuent de surveiller les effets secondaires liés à la vaccination anti-Covid. Plusieurs études se sont ainsi penchées sur des troubles cardiaques, très rares et, la plupart du temps, sans complications graves, mais ce sujet a été largement exagéré  comme l'a déjà expliqué cet article de vérification de l'AFP.

La désinformation au sujet des vaccins anti-Covid est massive et récurrente sur les réseaux sociaux et consiste souvent à affirmer qu'il y a un lien de causalité entre vaccination et décès, en interprétant de façon erronée les données de pharmacovigilance des autorités sanitaires.

L'AFP a consacré de très nombreux articles de vérification à ce sujet, comme ici par exemple.

Comme expliqué par les différentes autorités de santé depuis le début des campagnes de vaccination, les données figurant dans les bases de pharmacovigilance destinées à surveiller de potentiel effets indésirables des vaccins ne supposent pas de lien entre le décès et l'injection. Seule une analyse médicale approfondie peut établir un lien, le cas échéant.

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