Olivier Fabre (Divers droite), a fait passer une nouvelle tarification de la cantine municipale très contestée, avec en outre une restriction liée au manque de place face à la demande : depuis la rentrée, comme l’indique le site de cette commune du Tarn , “compte tenu de la capacité d’accueil de la cantine, la Municipalité sera amenée à prioriser les enfants dont les parents (ou le parent isolé) ont un besoin absolu de garde : activité professionnelle, recherche d’emploi, rendez-vous médical, raisons familiales motivées“. Face au tollé, Olivier Fabre s’est justifié notamment au cours de l’émission TPMP de C8 : faute de pouvoir ou de vouloir pousser les murs des cantines municipales, les élèves dont les parents n’ont pas d’activité professionnelle ne seront plus prioritaires. Inutile de préciser que bien des parents d’élèves n’ont pas digéré cette nouveau réglementation. Pourtant, selon le juge, elle n’est pas forcément illégale.
Le code de l’éducation prévoit la cantine pour tous
L’article L. 131-13 du code de l’éducation est clair a priori : “L’inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille“. Cela signifie : 1/ que les communes ne sont pas obligées de créer un service public de cantine ; 2/ que si elles le créent, elles ne peuvent restreindre l’accès aux enfants en fonction de l’activité professionnelle des parents. C’est d’ailleurs de qu’avait clairement affirmé le Conseil d’Etat lorsqu’il avait été saisi par une association de parents d’élèves, la FCPE du Rhône, à l’encontre d’une délibération du conseil municipal d’Oullins, réservant l’accès à la cantine aux enfants don les parents ont un emploi. Ce “critère de discrimination“, selon le Conseil d’État est “sans rapport avec l’objet du service public en cause” (Conseil d’Etat, 23 octobre 2009). Logique, s’agissant d’un service public à vocation sociale.
Reste que les modes de vie on évolué, et que la demande d’accès à la cantine s’est généralisée au point que bien des communes voient la capacité d’accueil de leurs cantines dépassée. Doivent-elles obligatoirement agrandir les cantines pour répondre à la demande ? C’est ce que semble impliquer le code de l’éducation. Mais le juge en a décidé autrement.
Le juge admet toutefois certaines restrictions
Ainsi, selon une cour administrative d’appel (CAA), qui s’est aidée des travaux préparatoires de la loi ayant créé l’article L. 131-13 dans le code de l’éducation, cet article ne fait pas obstacle “à ce que les collectivités territoriales puissent légalement refuser d’y admettre un élève lorsque, à la date de leur décision, la capacité maximale d’accueil de ce service public est atteinte” (CAA de Nancy, 9 déc. 2021). Voilà qui répond à la première question : les communes ne sont pas tenues d’agrandir indéfiniment leurs cantines à grands frais.
Les communes ne sauraient non plus accueillir plus d’élèves que la capacité d’accueil de leur cantine ne le permet, car ce serait contraire aux règles relatives aux établissements recevant du public : si un accident se produisait, cela conduirait le maire ou certains personnels de la mairie directement devant le juge pénal pour mise en danger d’autrui (articles 123-1 et 223-1 du code pénal).
Mais alors, il faut forcément établir des roulements ou des priorités entre les élèves : sur quels critères, puisque la loi exclut la situation de famille ?
Une autre cour administrative d’appel répond : “la commune peut établir un ordre de priorité pour lequel la disponibilité sur la pause méridienne de la famille pourrait être prise en compte sans que l’évaluation de cette disponibilité ne se réduise au critère d’activité professionnelle” (CAA de Versailles, 28 décembre 2012, à propos de Neuilly-Plaisance). Concrètement, cela signifie, selon une autre cour, qu’est légal un règlement qui tient compte de “critères non hiérarchisés” tels que “l’activité professionnelle des deux parents ou du parent dans le cas des familles monoparentales, l’état de santé des parents ou des enfants, les situations sociales particulières, l’importance des trajets entre le domicile et l’école, les rendez-vous médicaux, les entretiens d’embauches et les démarches liées à la recherche d’emploi” : en effet, “ces critères ne sont pas exclusivement liés à l’activité professionnelle des parents des enfants mais permettent de répondre à diverses situations répondant à l’objet du service public de la restauration scolaire“. Ils ne méconnaissent pas le principe d’égal accès au service public (CAA de Versailles, 18 décembre 2014, à propos de la commune d’Aubervilliers).
Nous ne connaissons par les termes exacts du règlement d’accès aux cantines municipales de Mazamet, sauf ce qu’indique le site de la commune : plusieurs critères sont apparemment pris en compte, reste à savoir si cela suffirait face à juge.